Écoutons les femmes…

Julie McDermott, enseignante en Techniques de travail social

Je l’avoue, lorsque j’ai pris connaissance du thème de la Journée internationale des droits des femmes de cette année, j’étais, comment dire… déçue? Écoutons les femmes : ça va de soi, non? Pourquoi en faire un thème alors qu’il y a tant de luttes très concrètes à mener et tant de thèmes à explorer?

Puis, tranquillement, l’idée a fait son chemin dans ma tête.

Je me suis rappelé un ancien voisin agriculteur qui, chaque fois qu’il venait nous donner des conseils sur notre jardin (impliquant trop souvent des produits chimiques et des pratiques douteuses!), s’adressait à mon amoureux. ALLÔ, c’est moi qui jardine ici! Mon chum ne sait pas faire la différence entre un plant de tomates déterminé ou indéterminé (c’est un peu niché, j’avoue, mais moi je sais!). D’ailleurs, ça ne l’intéresse pas du tout! Moi, par contre, j’ai travaillé tout un été dans une ferme maraîchère biologique, j’ai lu tous les livres de Yves Gagnon, j’ai planifié moi-même mes semis, j’ai bêché la terre avec mes petits muscles frêles de fille! On a eu beau lui répéter à maintes reprises que c’était moi la jardinière en chef, rien à faire, il revenait à la charge : « écoute, mon homme, tu devrais rajouter du fumier pour engraisser tes carottes! » (…soupir…)

Bien sûr, ce n’est qu’une anecdote. Une parmi cent, mille anecdotes vécues au quotidien par les « p’tites madames » de ce monde. Rien de très grave.

Mais je me suis quand même demandé si on les écoute, pour vrai, les femmes. Est-ce qu’on les prend au sérieux? Bien sûr, on peut se demander si les hommes nous écoutent car, disons-le, c’est légitime d’en douter à certains moments. Mais même entre nous, mesdames, est-ce qu’on s’écoute réellement?

Quand une femme veut sortir des sentiers battus et exercer un « métier d’homme »?

Quand une femme demande d’avoir un salaire égal à son collègue masculin?

Quand une femme noire dénonce le racisme dont elle est victime?

Quand une femme dit qu’elle en a trop sur les épaules, que sa charge mentale est trop grande, qu’elle n’en peut plus?

Quand une femme veut des enfants, ou qu’elle n’en veut pas, ou qu’elle trouve ça dur, la maternité?

Quand une femme demande à ce qu’on fasse plus attention à notre planète, parce qu’elle souhaite que ses enfants puissent y grandir et y élever leurs enfants à leur tour?

Quand une femme se présente en politique?

Quand une femme autochtone crie à l’aide à l’hôpital?

Quand une femme qui s’occupe de nos enfants dans les CPE demande de meilleures conditions de travail?

Quand une femme témoigne d’une agression sexuelle et dénonce son agresseur?

Quand une femme s’en fout de s’habiller comme les standards de beauté l’exigent?

Quand une femme handicapée dit qu’elle est capable d’occuper un emploi si on adapte les milieux de travail?

Quand une femme infirmière exhorte le gouvernement à investir dans le système de santé qu’elle tient à bout de bras depuis beaucoup trop longtemps?

Est-ce qu’on les écoute vraiment? Sans les juger. Sans leur remettre la faute sur le nez. Sans les culpabiliser ou minimiser leurs demandes. Sans remettre en doute leur intelligence, leur jugement, leurs choix. Est-ce qu’on est vraiment ouvert et ouverte à entendre ce qu’elles ont à dire?