L’Observatoire de la réussite : garder l’œil ouvert

Sara Trottier, enseignante de français

Le 7 février dernier, quelques jours après le jour de la Marmotte, la Ministre de l’Enseignement supérieur, Danielle McCann, est sortie de sa tanière pour aborder la réussite en éducation postsecondaire.

 

Elle a annoncé la mise en place d’un volet du Plan d’action pour la réussite déposé en septembre dernier, fort d’un budget de 450 millions de dollars sur 5 ans : la création de l’Observatoire sur la réussite en enseignement supérieur (ORES)1. Son mandat : réunir dans un même lieu les connaissances issues des plus récentes recherches dans les domaines de l’accessibilité à l’éducation postsecondaire, la persévérance et la réussite, et favoriser le transfert des connaissances avec les « praticiens ».

 

L’ORES sera en réalité une version bonifiée du CAPRES (consortium d’animation sur la persévérance et la réussite en enseignement supérieur), qui existe depuis 2002. L’entrée en vigueur de l’Observatoire est prévue pour l’automne 2022.

 

Les objectifs sont ambitieux. Le chantier pour la réussite vise à accroître les taux de diplomation, tant au collégial qu’à l’université. Le Ministère souhaite accroître le taux de diplomation au collégial, actuellement à 64%, à 70% en 5 ans. Pour le secteur universitaire, présentement à 80%, l’objectif est de l’augmenter à 84% en 5 ans. 

 

Le gouvernement se targue de viser un plus grand accès à l’enseignement supérieur pour les groupes qui y sont traditionnellement sous-représentés (milieux socioéconomiques défavorisés, premières générations, « internationaux », autochtones). Les besoins des populations étudiantes qui sont de plus en plus diversifiées doivent être connus pour qu’elles soient mieux accompagnées. Ce thème de l’inclusion des étudiantes et des étudiants marginalisés n’a toutefois été qu’une virgule dans la présentation de la Ministre, qui a ensuite abordé, avec plus d’ampleur, la valeur économique des études postsecondaires.

 

La Ministre McCann a ainsi souligné que la réussite en enseignement supérieur se veut une voie de solution pour résoudre la pénurie de main d’œuvre actuelle. En ce sens, ce plan agit parallèlement aux récentes bourses perspectives (https://www.quebec.ca/education/aide-financiere-aux-etudes/bourses-perspective), qui visent à diriger les étudiantes et les étudiants vers des programmes utiles. Danielle McCann l’a affirmé : l’enseignement supérieur est à concevoir comme un acteur central de la relance économique du Québec.

 

Les cibles ambitieuses de réussite sont reçues avec un certain scepticisme. La « génération Covid » accuse déjà un retard; fort est à parier que nous devrons composer avec les difficultés engendrées par la pandémie en éducation encore longtemps.

 

La Fédération des enseignantes et enseignants de cégep (FEC-CSQ) a accueilli avec intérêt l'annonce du MES. Lucie Piché, présidente de la FEC-CSQ, a toutefois tenu à rappeler qu’ « une part trop importante des sommes accompagnant le plan d'action sur la réussite ne se traduit malheureusement pas par des ressources enseignantes supplémentaires qui permettraient de mieux accompagner les étudiantes et étudiants. » Car la réussite passe avant tout par les profs.

 

Avant de rentrer dans son terrier, la Ministre McCann aura peut-être aperçu son ombre.

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Notes

1. La création de l’ORES correspond au volet 4 du Plan d’action sur la réussite en enseignement supérieur : « Développer des systèmes de gestion et de diffusion des données ainsi que l’expertise et l’innovation en matière de réussite en enseignement supérieur ».