Les cégeps : un outil de développement régional menacé ?

François Girard et Tommy Guénard, comité de développement du CMEC

 

Le Centre matapédien d’études collégiales a tenu une importante journée de réflexion collective le mercredi 17 mai dernier. L’énergie était au rendez-vous et tous les participantes et les participants ont œuvré au même objectif, celui de faire du CMEC pour les 25 prochaines années encore un outil d’occupation dynamique et durable du territoire tout en fournissant un enseignement supérieur diversifié, accessible et de qualité.

Cependant, au moment même où nous rêvions notre développement, des vents contraires se levaient du côté de Québec. En ce sens, nous vous transmettons une communication afin d’alerter l’ensemble des actrices et des acteurs qui peuvent, à leur manière, influencer les visées gouvernementales et patronales voulant réduire le rôle des cégeps en région.

Dans un premier temps, nous souhaitons saluer le merveilleux travail collectif qui a été réalisé mercredi 17 mai lors de la journée réflexive portant sur le développement futur du CMEC. Ce fut une journée fructueuse, énergisante où l’ensemble des actrices et acteurs ont eu l’occasion de témoigner de leur attachement au CMEC mais aussi de participer à l’élaboration d’une vision à long terme du rôle que doit jouer le CMEC dans le dynamisme et le développement régional.

Durant cette journée, où tout le monde (milieu matapédien, cégeps parrains, personnel et étudiant.e.s du CMEC, etc..) ramait dans la même direction, nous avons fait l’exercice d’identifier des opportunités, mais aussi des menaces externes. Il y en a une, peut-être même la plus grande, qui a échappé à notre radar collectif. Nous considérons important, voire primordial, de l’identifier et de travailler collectivement et solidairement à ce qu’elle ne se matérialise pas. Il en va de l’intérêt du réseau collégial et de celui du développement régional.

Pour faire une histoire courte (pas si courte que ça finalement), il y avait des séances de négociation pour le renouvellement de la convention collective des enseignant.e.s cette semaine-là, les 16 et 17 mai. Nous avons appris que pendant que nous réfléchissions collectivement au développement du CMEC, la partie patronale se faisait entendre sur notre demande M10, à savoir l’énoncé suivant :

Reconnaître dans la convention collective que le réseau des cégeps est un outil de développement socioéconomique important, notamment pour les régions, les communautés autochtones ainsi que pour l’occupation dynamique et durable du territoire.

Notre comité de négociation avait préalablement présenté cette demande à nos vis-à-vis du CPNC en expliquant que nous souhaitions inscrire à nos conventions collectives un énoncé de principes reconnaissant les éléments fondamentaux qui, selon nous, structurent la mission du réseau collégial comme nous voulons la préserver.

Selon nous, ce principe n’a rien de menaçant et devrait même faire l’objet d’une motion à l’Assemblée nationale. Motion qui devrait être portée par l’ensemble des partis politiques et acceptée à l’unanimité. Principe que devrait même faire sien notre comité de développement ainsi que le comité de vigie.

Or, si elle a le mérite d’être claire, la perspective de la partie patronale en réponse à cette proposition a de quoi nous inquiéter ! En effet, soulignons que de l’avis de la Fédération des cégeps et du MES, dont le CPNC est le porte-voix, reconnaître dans la convention de tels principes, notamment en ce qui concerne les régions, poserait problème quant aux développements souhaités par la partie patronale avec l’enseignement à distance !

Afin de mettre en contexte nos lectrices ou lecteurs externes au réseau collégial, la première partie du dépôt des offres patronales, dans le cadre des négociations pour le renouvellement de la convention collective des enseignant.e.s, s’intitule « Actualiser l’offre de service et de formation ». La partie patronale (Fédération des cégeps et MES via le CPNC), dans cette section, mise tout sur la technologie et ce qu’elle appelle la formation à distance (FAD). Voici d’ailleurs quelques énoncés de principes tirés de son cahier de demandes :

  • Prévoir des mesures pour encourager la participation du personnel enseignant à la FAD ;
  • Évaluer les possibilités concernant la rémunération pour les activités autres que la prestation de cours dans le cadre de la FAD asynchrone (cours préalablement enregistré que l’étudiant.e pourra suivre au moment convenu et qui pourra servir pour les années subséquentes) ;
  • Discuter des droits d’auteur dans le cadre de la FAD asynchrone.

Pour notre part, nous croyons que tout développement de l’enseignement à distance (EAD) doit se faire sur la base de certaines garanties quant à la pérennité du réseau et à la vitalité des cégeps, et ce, sur tout le territoire. Nous ne sommes pas contre son développement, mais cette forme d’enseignement doit être balisée et doit surtout être une mesure exceptionnelle afin de vitaliser et dynamiser l’offre de formation en région en consolidant sa clientèle.

L’ensemble des acteurs ayant à cœur le développement régional doit prendre en compte ce que représente la vision du Gouvernement. Seuls, nous n’arriverons pas à contrer cette menace externe. ENSEMBLE, les acteurs politiques, les directions générales de nos institutions, le personnel du CMEC, la communauté, NOUS pouvons faire reculer le Gouvernement. Pour cela, il faut que tout le monde persiste à ramer du même côté et comprenne qu’on ne peut rester les bras croisés. Il est impératif que les directions générales de collèges fassent entendre leur voix auprès de leur Fédération et du MES.

Pendant que les forces vives du milieu luttent pour donner un avenir au CMEC et faire de cette institution matapédienne un acteur clé de notre politique d’occupation du territoire, de puissants vents se préparent et nous devons être prêts, ENSEMBLE, à y faire face.

Bonne réflexion !